
- Centre Philou
- 13/09/2023
- Contenu éducatif
Le Centre d’expertise et de services en polyhandicap (CESP)
En fondant le Centre Philou en 2005, Diane Chênevert et ses partenaires étaient portés par une vision d’améliorer la qualité de vie des familles d’enfants polyhandicapés. Depuis 2017, le Philou LAB développe des ressources et services pour la clientèle polyhandicapée tout en faisant connaître le polyhandicap par l’entremise de recherches et de formations. C’est à travers le développement de l’expertise du Philou LAB que s’est concrétisé le besoin de combiner nos forces à celles d’autres parties prenantes pour propulser nos ambitions.
Ainsi, un grand projet de collaboration est né ! Suite à une rigoureuse élaboration d’une vision commune impliquant des consultations auprès des familles et d’expert·e·s du milieu de la santé et des professionnel·le·s légaux, scolaires et économiques, le Centre d’expertise et de services en polyhandicap du Québec (CESP) s’est matérialisé.
L'essentialité d'un tel projet
Le CESP répond à un réel besoin – soit celui de créer une expertise concentrée sur le polyhandicap. Contrairement à d’autres pays, le polyhandicap n’est pas reconnu au Québec comme étant une condition particulière. Une forte invisibilisation de cette population existe non seulement dans l’espace public, mais aussi dans le réseau médical et scolaire, étant souvent diluée avec d’autres types de handicaps.
Entre autres, les personnes polyhandicapées sont :
- soumises à plusieurs hospitalisations ou se retrouvent souvent à l’urgence inutilement ;
- vulnérables face à l’incompréhension de leurs besoins de bases ;
- tributaires de la santé physique et psychologique de leurs proches.

* Il est à noter que le gouvernement du Québec n’a toujours pas reconnu une définition officielle du polyhandicap. Le ministère ne parle donc pas ici spécifiquement des besoins des personnes polyhandicapées, mais plutôt des autres types de handicap.
Le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec a lui-même reconnu que des écarts persistaient encore aujourd’hui entre les besoins des personnes ayant une déficience physique, intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme et un niveau de réponse adéquat. * Cette réalité se veut encore plus marquée auprès de la population polyhandicapée qui se voit négligée par rapport à d’autres groupes de personnes handicapées et non handicapées de par la non-reconnaissance gouvernementale du polyhandicap. Les principes d’inclusions, de développement et de soins sont généralement appliqués de façon différente auprès des personnes polyhandicapées qu’auprès des populations pouvant présenter une incapacité moins grave.
Les besoins des personnes polyhandicapées sont évolutifs et complexes. Le système n’est pas outillé pour répondre à de tels besoins qui nécessite une connaissance approfondie. Cette réalité est causée par une multitude de facteurs :
- un manque de reconnaissance du statut vulnérable ;
- l’absence d’un cadre national clair établi permettant une prise en charge efficace ;
- une rémunération inadéquate des médecins face à la complexité des soins requis par cette population ;
- un cloisonnement des soins et services résultant par un important manque de communication entre les parties prenantes ;
- un sous financement des services éducatifs et communautaires qui n’est pas en concordance avec la complexité de la tâche ;
- une disparition de services éducatifs et communautaires pour la clientèle arrivée à l’âge adulte ;
- une mise de côté des besoins des parents des personnes polyhandicapées.
Ces importants manquements ont pour conséquence la création d’un sentiment de vide et d’impuissance auprès des parties prenantes. La qualité de vie des personnes polyhandicapées ainsi que la confiance envers le système en souffre.
Le projet
Partenaires des réseaux de la santé et de l’éducation, chercheur·e·s, ressources communautaires, universités et parents sont au cœur du Centre d’expertise sur le polyhandicap du Québec. Cette conjugaison des forces a pour objectif de mener à bien la prise en charge du bien-être de la personne polyhandicapée ainsi que celui de sa famille de manière fluide et en continu. Il est important de noter que ce projet novateur répond aux attentes des politiques stratégiques gouvernementales visant une meilleure intégration des services pour les personnes handicapées et leur famille.
Selon une approche holistique révolutionnaire, le CESP sera basé sur la santé de la personne tout au long de sa vie, rejoignant le médical, social, scolaire, économique et juridique. Le noyau du projet constitue l’instauration d’une plateforme numérique interactive où parents, intervenant·e·s, fournisseurs de services (y compris le gouvernement du Québec) pourraient y retrouver l’information concernant la prestation de service de l’individu polyhandicapé. L’innovation et l’usage de nouvelles technologies tel que la téléconsultation y seront priorisés. Par ailleurs, ces nouvelles technologies seront combinées à des ressources humaines encadrées par une équipe noyau permanente. Par ce dispositif, les parents seront perçus comme les parties prenantes principales dans l’intervention auprès de leur enfant, contrairement aux pratiques actuelles.

- Retombées économiques*
- 20 M$ d’investissement gouvernementaux (représentant 59% des dépenses) ;
- 39 M$ d’économies directes (diminution de prestations de services de santé inadéquats et excessifs) ;
- 76 M$ de contributions sociétales (augmentation de la productivité en raison du retour des parents sur le marché du travail) ;
- 115 M$ de retombées économiques totales. **
- Par dollar investi
- rendement de 5,76 $ ;
- épargne de 1,95 % en coûts directs sur le système de santé ;
- contribution de 3,81 % au PIB québécois. **
*Il s’agit ici de prédictions ayant été calculées selon la Formule du ministère de la Santé du Québec servant à évaluer la valeur potentielle des projets novateurs.
** Toutes choses étant égales par ailleurs.
Ailleurs dans le monde
- La France a été le premier pays à reconnaître et définir le polyhandicap. Elle possède un système de centres spécialisés dédiés au polyhandicap assurant la continuité des soins à travers le pays.
- L'Ontario possède un modèle de soins primaires adoptant les principes des « Patient centred medical home » (Maison médicale centrée sur le·la patient·e) pour les personnes ayant une déficience et des troubles du développement.
- L'État américain de la Pennsylvanie adopte un modèle des soins médicaux, sociaux et comportementaux intégrés découlant d’une initiative communautaire.
- L’Italie dispose d’un réseau de professionnel·le·s spécialistes du polyhandicap au sein duquel la connaissance de savoir est priorisée.
- La Norvège possède un système de soutien à vie pour les personnes polyhandicapées sur tous les plans (éducatifs, sociaux et financiers). Leur approche se découle de la vision selon laquelle il s’agit d’une responsabilité publique que de permettre à l’enfant polyhandicapé de grandir avec sa famille.
Le Centre Philou se fait un devoir de développer la recherche au sujet de la population polyhandicapée ainsi que de démocratiser ce savoir en collaboration avec différents partenaires depuis plusieurs années. La concrétisation du CESP insuffle un véritable vent d’espoir quant à l’avancement des pratiques dans le monde du polyhandicap.

Premier Forum québécois sur le polyhandicap

Sources
- Cet article a été rendu possible grâce à l’expertise de Deloitte.
- PhilouLAB – Campus Philou.