
- Centre Philou
- 21/11/2023
- Contenu éducatif
La création du lien
« Si on accepte qu’une personne soit un tout, c’est tout entière qu’elle doit être objet de considération, avec ses forces, mais aussi avec ses faiblesses et ses échecs. »
-Gilles Gendreau
À première vue, la création d’un lien de confiance avec une personne polyhandicapée peut sembler comme étant une tâche laborieuse. La non-verbalité peut sembler comme étant un frein à l’échange avec une personne polyhandicapée. Toutefois, la parole n’est pas le seul moteur de communication possible. Ainsi, les possibilités sont vastes, voire infinies.
Apprendre à connaître la personne polyhandicapée avec laquelle nous intervenons s’agit d’un exercice indispensable. Même si cela peut paraître comme une évidence, cet apprentissage requiert une patience et un sens de l’observation aiguisé. Ce processus consiste à comprendre les préférences alimentaires, les habitudes de sommeil, la routine hygiénique, les activités coup de cœur ainsi que toutes les particularités motrices ou intellectuelles de la personne polyhandicapée qui font d’elle un individu unique.

Ce qui est si particulier chez la clientèle polyhandicapée : le contraste entre la simplicité et la complexité de tout ça. La clientèle vient parfois avec des soins complexes, des diagnostics difficiles à obtenir et à comprendre, des difficultés à communiquer, mais c’est également tellement simple de les aimer complètement.
Camille, Philoupette

Toute personne a des besoins multiples tels que le besoin de survie, de contrôle, d’expression de soi, de plaisir, d’appréciation ou encore d’estime. La différence avec les personnes polyhandicapées, c’est qu’elles sont entièrement dépendantes d’autrui pour combler ces besoins. C’est donc essentiel que l’accompagnateur·trice comprenne la personne pour mener à bien son épanouissement et son développement. La création d’un lien de confiance fort et durable avec une personne polyhandicapée est fondamentale pour que celle-ci parvienne à faire comprendre ses besoins et du fait même, vivre sa dignité.
L'approche Philou en trois savoirs
Le savoir - comprendre le polyhandicap
Comprendre la définition du polyhandicap et s’informer sur les impacts que cette réalité a sur la vie de la personne polyhandicapée ainsi que celle de sa famille est crucial à la création d’un lien. Cette compréhension permet de déconstruire les préjugés et d’adapter ses attentes. Antoine Cavalié explique que : « Les personnes en situation de polyhandicap, par leur extrême dépendance, ont besoin du concours de notre action pour vivre au jour le jour. Plus encore, c’est à nous de mettre en mots ce qu’ils vivent, c’est à nous de dire que telle personne aime la piscine, que telle autre aime se promener. »

Le savoir-faire - développer ses compétences
La personne a des forces, des capacités et des intérêts qui doivent être au cœur de l’intervention de l’éducateur·trice. Il s’agit aussi de maîtriser les rouages de son quotidien, de son alimentation à ses activités préférées, pour trouver les outils nécessaires à l’intervention.

Un·e Philoupet·te, ça fait juste se camoufler dans le quotidien des jeunes, ça leur emprunte leur quotidien à eux. Ça se fait trois ou quatre ami·e·s le temps d’une journée. Ça mange, ça se lave, ça joue, ça rit, ça pleure et ça partage avec ces ami·e·s. Puis, à la fin de la journée, ça présente son ami·e à quelqu’un d’autre et ça lui dit « à demain » !
Théo, Philoupet
Le savoir-être - adopter la bonne attitude
Être Philoupet·te nous permet d'apprendre sur l'importance du souci pour son bien-être personnel. Vu que notre rôle est d'aider le jeune à accéder à ce bien-être par le biais de notre accompagnement, et bien ça nous le met en plein visage ! Est-ce que j'ai de la bienveillance et du souci pour moi-même ? Si je ne l'ai pas...est-ce qu'il y a manière de commencer pas à pas ce voyage pour apprendre à m'aimer moi-même ?
Mark, Philoupet

Il est esentiel de respecter la dignité de la personne polyhandicapée en communiquant directement avec elle et non par l’entremise de son accompagnateur·trice. Le polyhandicap n’empêche pas un individu de comprendre son entourage ! Il faut user d’un langage adapté à la personne comme le fait d’utiliser des phrases plus courtes ou encore des pictogrammes pour communiquer. Les attitudes favorables à la création d’un lien sont nombreuses : la considération pour autrui, la sécurité, la confiance, la disponibilité, l’authenticité, l’empathie …
La prophétie auto-réalisatrice
La prophétie auto-réalisatrice, concept clé de l’intervention, nous apprend que les personnes polyhandicapées sont très perceptibles aux croyances que porte leur intervenant·e face à leurs capacités. Si un·e éducateur·trice a de minces attentes envers une personne polyhandicapée, son approche envers celle-ci en sera teintée, diminuant ainsi le développement de la personne polyhandicapée et renforçant les idées fausses de l’intervenant·e. La prophétie auto-réalisatrice nous rappelle l’importance de croire aux capacités de développement de la personne, au-delà de ses difficultés. Un·e intervenant·e qui croit au potentiel du jeune polyhandicapé mettra en place les conditions les plus favorables à son épanouissement et sa réussite.

Chaque jeune est différent ! Il n’y a pas de polyhandicap qui se traduise exactement de la même façon d’une personne polyhandicapée à une autre, ce qui fait que cette clientèle est très diversifiée et unique ! Voir une réaction de la part d’un jeune comme un sourire et un rire est assez banal chez une clientèle neurotypique, mais chez nos cocos en situation de polyhandicap, ça vaut de l’or !
Anne, Philoupette
Sources
- PhilouLAB – Campus Philou.
- Gendreau, G. (2001). Jeunes en difficulté et intervention psychoéducative. Éditions Sciences et culture.
- Cavalié, A. (2017). Chapitre 4. La rencontre avec la personne polyhandicapée : un regard philosophique. Dans : Philippe Camberlein éd., La personne polyhandicapée (pp. 131-141). Paris: Dunod. https://doi.org/10.3917/dunod.ponso.2017.01.0131.